3 arrêts du Conseil d'Etat à savoir concernant les marchés publics
C.E., ass. 28 décembre 2009, n° 304802, Commune de Béziers :
Considérant, en premier lieu, que les parties à un contrat administratif peuvent saisir le juge d'un recours de plein contentieux contestant la validité du contrat qui les lie ; qu'il appartient alors au juge, lorsqu'il constate l'existence d'irrégularités, d'en apprécier l'importance et les conséquences, après avoir vérifié que les irrégularités dont se prévalent les parties sont de celles qu'elles peuvent, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, invoquer devant lui ; qu'il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise et en tenant compte de l'objectif de stabilité des relations contractuelles, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, la résiliation du contrat ou, en raison seulement d'une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, son annulation ;
Considérant, en second lieu, que, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l' exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 2-I de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, désormais codifiées à l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès lors qu'il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans le département ; que l'absence de transmission de la délibération autorisant le maire à signer un contrat avant la date à laquelle le maire procède à sa signature constitue un vice affectant les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement ; que, toutefois, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, ce seul vice ne saurait être regardé comme d'une gravité telle que le juge doive écarter le contrat et que le litige qui oppose les parties ne doive pas être tranché sur le terrain contractuel ;
Considérant, dès lors, qu'en jugeant que la convention conclue le 10 octobre 1986 entre les communes de Villeneuve-lès-Béziers et de Béziers devait être déclarée nulle au seul motif que les délibérations du 29 septembre 1986 et du 3 octobre 1986 autorisant les maires de ces communes à la signer n'avaient été transmises à la sous-préfecture que le 16 octobre 1986 et qu'une telle circonstance faisait obstacle à ce que les stipulations du contrat soient invoquées dans le cadre du litige dont elle était saisie, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ; que, par suite, la COMMUNE DE BEZIERS est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;
C.E., 12 janvier 2001, n° 338551, M. Manoukian :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par acte d'engagement du 10 juillet 2000, le Crédit municipal de Paris a conclu, en application du 10° du I de l'article 104 du code des marchés publics alors en vigueur, avec M. MANOUKIAN, architecte, un marché négocié ayant pour objet, pour une durée de trois ans, des prestations de services d' architecture ; que, par lettre du 30 novembre 2001, le Crédit municipal de Paris a informé M. MANOUKIAN de sa décision de mettre fin au marché litigieux ; que M. MANOUKIAN a demandé, en application de l'article 8 résiliation du cahier des clauses techniques particulières, le paiement, d'une part, de la somme de 45 586,78 euros TTC correspondant au prix majoré de diverses prestations complémentaires exécutées et non réglées et, d'autre part, de la somme de 57 930,63 euros TTC au titre des mensualités qui devaient lui être versées jusqu'à la fin du marché, soit une somme totale de 104 517, 41 euros TTC ; que cette demande ayant été rejetée par le Crédit municipal de Paris, M. MANOUKIAN a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la condamnation du Crédit municipal de Paris à lui verser cette somme ; que, par un jugement du 9 mai 2008, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande, au motif que le marché litigieux, fractionné pour contourner les règles de passation du code des marchés publics, était entaché de nullité ; que M. MANOUKIAN se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 février 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de ce jugement ; Considérant que lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ; qu'ainsi, lorsque le juge est saisi d'un litige relatif à l'exécution d'un contrat, les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige ; que, par exception, il en va autrement lorsque, eu égard d'une part à la gravité de l'illégalité et d'autre part aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat ; Considérant que, pour constater la nullité du contrat conclu par le Crédit municipal de Paris et M. MANOUKIAN et écarter en conséquence son application, la cour administrative d'appel de Paris s'est bornée à relever que le marché avait été passé en méconnaissance du seuil de 700 000 francs (TTC) fixé par les dispositions du 10° du I de l'article 104 du code des marchés publics alors en vigueur, sans rechercher si, eu égard d'une part à la gravité de l'irrégularité et d'autre part aux circonstances dans lesquelles elle avait été commise, le litige ne pouvait être réglé sur le fondement du contrat ; qu'en statuant ainsi, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. MANOUKIAN est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;
C.E. , 20 avril 2011, n° 342850, Commune de Baie-Mahault :
Considérant que le contrat dont la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT invoque l'application a été conclu en 2006 en application de la clause de tacite reconduction présente dans le contrat initialement conclu en 1991 avec la société Serco ; que, toutefois, l'irrégularité tenant à la conclusion du contrat en application d'une clause de tacite reconduction, eu égard à sa gravité et sans même que le juge du référé provision, compte tenu de son office, ait à examiner les circonstances dans lesquelles elle a été commise, ne permet pas de regarder l'obligation qui découlerait de ce contrat comme non sérieusement contestable ; que, par suite, la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT est fondée à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Basse-Terre a considéré que l'obligation dont se prévalait la société Serco sur le fondement du contrat la liant à la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT, reconduit en 2006 en application de la clause de tacite reconduction, n'était pas sérieusement contestable et l'a condamnée sur ce fondement à verser une provision de 58 258,43 euros à cette dernière ;
Considérant qu'il y a lieu d'examiner, par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, l'autre moyen soulevé par la société Serco et tenant au caractère non sérieusement contestable de la créance dont elle se prévaut sur la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT au titre de l'enrichissement sans cause de cette dernière ;
Considérant que la réalité et l'utilité des prestations de mise à disposition de journaux électroniques au titre de la période du 1er juillet au 31 décembre 2008 ne sont pas sérieusement contestées par la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT ; que, compte tenu de la contestation portant sur le montant de la créance, l'obligation dont se prévaut la société Serco au titre de ces prestations doit être regardée comme non sérieusement contestable à hauteur de 30 000 euros ; qu'il y a lieu en conséquence de condamner la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT à lui verser une provision de ce montant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de faire droit aux conclusions de la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT tendant à la constitution de garanties, que celle-ci doit être condamnée à verser à la société Serco une provision de 30 000 euros ; que cette somme portera intérêts à compter du 6 février 2009, date à laquelle la société Serco en a demandé le paiement à la COMMUNE DE BAIE-MAHAULT dans sa requête introductive d'instance enregistrée au greffe du tribunal administratif de Basse-Terre ; que la société, dont la demande de capitalisation des intérêts a été présentée dans cette même requête, a également droit, en application de l'article 1154 du code civil, à la capitalisation des intérêts à compter du 7 février 2010, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière ;
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